La Métropole européenne de Lille a choisi de faire suivre son Plan Climat Air Énergie Territorial (PCAET) par ce qui ressemble à un comité de suivi baptisé Haut Conseil métropolitain pour le Climat, « instance de gouvernance territoriale et partenariale » du PCAET. Piloté par deux élus, administré par la seule MEL, ce Conseil sera installé le lundi 4 octobre, de 18h30 à 20h30, en salle du Conseil, à Biotope (accueil à partir de 18h00).
Cet événement survient quelques semaines après la publication du rapport 2021 du Haut Conseil pour le climat (l’« original »), dont la version « grand public » résumée et illustrée a été publiée le 16 septembre. Ce document se termine (p.15) par 5 recommandations :
1. « Clarifier des politiques publiques encore peu lisibles » : « c’est une manière polie de dire que la puissance publique se donne actuellement des objectifs contradictoires les uns avec les autres », estime Jean-Marc Jancovici dans un billet en date du 19 septembre. L’épisode de la loi Climat et résilience a illustré ce grand écart permanent entre l’emphase des déclarations publiques et l’indigence des actions concrètes.
2. « Finaliser sans attendre les "documents stratégiques" » : ce sont les très nombreux plans de cadrage (tels que plans d’action des ministères, PCAET, SRADDET, PLU des collectivités locales, etc.) à mettre en accord vers les objectifs nationaux. La mauvaise volonté est ici évidente : ces documents sont lacunaires (la plupart des ministères tels que l’éducation ou - c’est un comble - la santé n’en disposent pas), et lorsqu’ils existent, ils ne sont pas plus cohérents que les politiques publiques nationales qu’ils déclinent, et en outre ne sont pas toujours rédigés pour être respectés. Une manière de dire que les pouvoirs publics agissent alors qu’ils n’entament rien de substantiel.
3. « Pérenniser les aides et les investissements inscrits au sein des plans de relance qui contribuent aux changements structurels bas-carbone » : cela signifie à la fois rendre les plans de relance « bas-carbone compatibles » (pour le moment cet aspect là n’est pas encore suffisamment pris en compte) et rendre ces financements pérennes, comme cela a été fait (hélas) pour la PAC (transformée en système de subvention de l’agro-industrie) ou le CICE (transformé en baisses pérennes des contributions et cotisations patronales).
4. « Améliorer les processus d’évaluation et de suivi des politiques publiques » : les évaluations ex-post des politiques publiques demeurent rares, souvent confidentielles, et servent rarement pour les politiques mises en œuvre. Cette caractéristique n’est pas propre au climat. Par exemple : il existe un plan régional santé-environnement : nous en sommes à la version 4 alors que la version 3 n’est toujours pas évaluée, mais cela a peu d’importance car ces plans n’influent en rien sur les projets de professionnels de santé.
5. « Intégrer systématiquement l’adaptation au changement climatique dans les politiques aux échelons national et territoriaux » : la dérive climatique va s’intensifier dans les 20 prochaines années quoi que nous entreprenions maintenant, cela signifie que les décisions ne doivent plus tenir compte principalement des conditions environnementales présentes, mais se projeter dans un futur qui sera très différent de celui que nous pouvons anticiper de notre expérience ou de modèles abstraits dont la plupart des économistes et des gestionnaires sont friands.
The Shift Project préconise en outre la formation de tous les fonctionnaires et tous les élus à la compréhension des enjeux. L’ignorance profonde et parfois agressive de la plupart des responsables politiques actuels concernant ces questions vitales est peut-être le premier problème à traiter. The Shift Project vient de publier la résilience des territoires (3 volumes : Comprendre, Agir, Organiser), et sa première proposition est justement de consacrer 1% du budget des collectivités locales à de « l’acquisition de connaissances » sur la question énergie - climat, en commençant par former leurs cadres : compréhension de la situation actuelle, risques futurs et leur hiérarchie, alternatives possibles pour l’avenir.
Seul le point 1 relatif aux politiques publiques peut encore échapper à la vigilance de ce Haut Conseil pour le Climat métropolitain. Pour le reste, nous attendons qu’il se montre cohérent avec son grand frère national et prépare effectivement la Métropole à un futur que l’inaction actuelle a rendu menaçant. Le Pacte pour la transition sera attentif à ses propositions et ses (éventuelles) dérives.